Actualités Covid-19 en droit social

Toutes les audiences prévues devant les Conseils de Prud’hommes durant la période de confinement seront renvoyées à des dates ultérieures, dont nous ne manquerons pas de vous informer. L’activité des Conseils de Prud’hommes et des Cours d’appel reprend progressivement depuis le 11 mai 2020 : nous vous tiendrons informés individuellement du maintien ou non de vos audiences prévues sur les mois de mai et juin 2020.

Vous trouverez sur cette page les mesures exceptionnelles prises par l’Etat français en matière de droit du travail dans le contexte de l’état d’urgence sanitaire lié au Covid-19. Nous nous attacherons à actualiser cette page régulièrement tout au long de la crise sanitaire, afin de vous fournir les informations les plus exactes et complètes possibles. Nous restons à votre disposition pour tout renseignement complémentaire.

Décrets du 16 avril 2020 relatifs au maintien de salaire et à l’activité partielle

Le décret n°2020-434 du 16 avril 2020 énonce principalement :

  • Que le maintien de salaire de l’article L1226-1 est versé dès le premier jour d’arrêt sans carence.
  • Sauf pour les arrêts maladie ayant débuté entre le 12 et le 23 mars 2020, en ce cas le maintien de salaire est versé à compter du 4ème jour d’absence
  • Que les arrêts ayant déjà été indemnisés au cours des 12 derniers mois ne doivent exceptionnellement pas être prise en compte pour déterminer la durée d’indemnisation à laquelle a droit le salarié
  • A compter du 12 mars et jusqu’au 30 avril 2020, quelle que soit la durée totale d’indemnisation, le montant de l’indemnité complémentaire est égal à 90% de la rémunération brute, si le salarié bénéficie d’un arrêt de travail prévu à l’article 1er du décret du 31 janvier 2020 (arrêts pour quarantaine ou pour garde d’enfants de moins de 16 ans).

Le décret n°2020-435 du 16 avril 2020, complété par le décret n°2020-522 du 5 mai 2020, est pour sa part relatif aux modalités de calcul de l’indemnité d’activité partielle versée par les employeurs aux salariés, et de l’allocation d’activité partielle versée par l’Etat aux employeurs, pour certaines catégories de travailleurs (salariés au forfait, personnel navigant, VRP, journalistes, travailleurs à domicile…). Le décret apporte également des précisions sur la façon dont doit être prise en compte la part de rémunération variable, et rappelle certaines sommes qui sont à exclure de l’assiette de calcul.

Ordonnances du 2 avril 2020

Cinq nouvelles ordonnances ont été publiées ce 2 avril en droit du travail, pour répondre au contexte de crise sanitaire.

L’ordonnance n°2020-385 porte sur la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (dite « prime Macron ») et apporte les modifications principales suivantes :

  • les accords d’intéressement conclus entre le 1er janvier et le 31 août 2020 peuvent exceptionnellement porter sur des durées inférieures à 3 ans (sans pouvoir être inférieures à 1 an)
  • le montant de la prime peut être modulé selon les bénéficiaires en tenant compte des conditions de travail liées à l’épidémie de Covid-19
  • la prime peut être versée jusqu’au 31 août 2020 (au lieu du 30 juin)
  • pour les entreprises mettant en oeuvre un accord d’intéressement, la prime est exonérée d’impôt et de charges et cotisations sociales jusqu’à 2000 € (au lieu de 1000 €) pour les salariés ou agents publics ayant perçu au cours des douze mois précédant son versement une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du SMIC correspondant à la durée contractuelle de travail

L’ordonnance n°2020-386 porte essentiellement sur les conditions d’exercice des missions des services de santé au travail :

  • les médecins du travail sont autorisés à effectuer des tests de dépistage du Covid-19, et à prescrire et renouveler des arrêts de travail à ce titre
  • les visites médicales qui devaient avoir lieu à compter du 12 mars 2020 peuvent être reportées, sous réserve de l’appréciation du médecin du travail, sans que cela fasse obstacle à l’embauche ou à la reprise de travail
  • les autres interventions du médecin du travail dans les entreprises peuvent également être reportées ou aménagées
  • un décret doit venir préciser les conditions et limites de ces reports

L’ordonnance n°2020-387 porte sur la formation professionnelle et prévoit notamment que les contrats d’apprentissage et de professionnalisation dont la date de fin d’exécution survient entre le 12 mars et le 31 juillet 2020, sans que l’apprenti ait achevé son cycle de formation en raison de reports ou d’annulations de sessions de formation ou d’examens, peuvent être prolongés par avenant jusqu’à la fin du cycle de formation poursuivi initialement.

L’ordonnance n°2020-388 est relative au report du scrutin de mesure de l’audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés et à la prorogation des mandats des conseillers prud’hommes et membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles.

L’ordonnance n°2020-389 prend des mesures d’urgence à l’égard des institutions représentatives du personnel :

  • les opérations électorales en cours dans les entreprises sont suspendues jusqu’à 3 mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire
  • le cas échéant, les mandats des représentants du personnel sont prorogés jusqu’à la proclamation des résultats du scrutin à venir
  • pour la durée de l’état d’urgence sanitaire, le recours à la visioconférence et à la conférence téléphonique (précisions à venir par décret) est autorisé pour l’ensemble des réunions des instances représentatives du personnel, après que l’employeur en a informé leurs membres
  • en cas d’impossibilité de recourir à la visioconférence ou à la conférence téléphonique ou lorsqu’un accord d’entreprise le prévoit, le recours à la messagerie instantanée est autorisé pour l’ensemble des réunions des instances représentatives du personnel, après information de leurs membres
  • l’employeur qui impose la prise de jours de repos aux salariés, ou qui déroge aux durées maximales de travail ou aux repos hebdomadaires/quotidiens, en application de l’ordonnance n°2020-323 du 25 mars 2020, doit consulter le CSE sans délai ; ce dernier dispose d’un délai d’un mois pour rendre son avis, mais ce délai n’empêche pas l’employeur de mettre d’ores et déjà en oeuvre la mesure considérée

Ordonnance du 27 mars 2020 relative à l’activité partielle

L’ordonnance n°2020-346 du 27 mars 2020, modifiée par l’ordonnance n°2020-428 du 15 avril 2020 et par l’ordonnance n°2020-460 du 22 avril 2020, apporte des précisions sur le régime de l’activité partielle (communément appelé « chômage partiel »). En voici les principaux apports :

  • Le taux horaire de l’indemnité d’activité partielle versée aux salariés ne peut être inférieur au taux horaire du SMIC. Lorsque le taux horaire habituel de rémunération d’un salarié est déjà inférieur au SMIC (par exemple contrats d’apprentissage), alors l’indemnité d’activité partielle qui lui est versée est égale à son taux habituel de rémunération.
  • L’indemnité horaire d’activité partielle versée par l’employeur aux salariés dont la rémunération est supérieure ou égale au SMIC, correspond à 70 % de la rémunération horaire brute antérieure du salarié, sans pouvoir être inférieure à 8,03 €.
  • L’activité partielle s’impose au salarié protégé, sans que l’employeur n’ait à recueillir son accord, dès lors qu’elle affecte tous les salariés de l’entreprise, de l’établissement, du service ou de l’atelier auquel est affecté ou rattaché l’intéressé.
  • Un régime d’activité partielle spécifique est mis en place pour les salariés du particulier employeur.
  • Cette ordonnance comprend enfin diverses dispositions spécifiques à certains emplois (marins, salariés portés…).

Ordonnances et décrets du 26 mars 2020

Plusieurs ordonnances et décrets sont parus ce 26 mars, modifiant notamment un certain nombre de normes en matière de droit social, dans le contexte de crise sanitaire lié au Covid-19.

Nous avons répertorié ci-après les principales nouveautés qui nous semblent susceptibles de vous intéresser.

I/ Le décret n°2020-325 du 25 mars 2020 a modifié le régime de l’activité partielle.

Les principales nouvelles dispositions sont les suivantes :

  • En cas de « sinistre ou intempérie à caractère exceptionnel » ou d’autre « circonstance à caractère exceptionnel », l’employeur peut consulter le CSE sur la mise en place de l’activité partielle postérieurement à la demande adressée à la Préfecture (alors qu’en temps normal ce doit être fait préalablement), à condition de transmettre l’avis du CSE dans un délai maximum de deux mois à compter de cette demande. Le texte précise que l’avis du CSE doit être sollicité « si l’entreprise en est dotée » : attention, à notre sens, les entreprises qui n’ont pas mis en place le CSE alors qu’elles y sont en principe tenues compte tenu de leurs effectifs devront pouvoir justifier d’un procès-verbal de carence pour être exemptées de l’obligation de consultation du CSE.
  • Normalement, la demande d’activité partielle doit être faite préalablement, puis il faut attendre, pour la mettre en œuvre effectivement, l’autorisation de l’administration qui doit intervenir dans un délai de 15 jours. Toutefois, en cas de « sinistre ou intempérie à caractère exceptionnel », et désormais aussi en cas d’autre « circonstance à caractère exceptionnel », l’employeur peut commencer à mettre en œuvre l’activité partielle puis adresser sa demande dans un délai de trente jours. En outre, jusqu’au 31 décembre 2020, le délai dans lequel l’administration doit donner sa réponse à la demande d’activité partielle est ramené à deux jours : à défaut de réponse de l’administration dans ce délai, cela vaut acceptation implicite de la demande d’activité partielle.
  • Est supprimée la disposition qui interdisait le recours au chômage partiel par réduction de l’horaire de travail pour les salariés assujettis à un forfait en jours ou en heures sur l’année. Il est donc possible de décider d’une réduction d’horaires pour ces salariés, par diminution du nombre de jours travaillés. En ce cas, un jour de travail est valorisé à hauteur de 7 heures.
  • La durée maximale de l’autorisation d’activité partielle passe de 6 à 12 mois.
  • Le montant de l’allocation d’activité partielle remboursée par l’État à l’employeur était auparavant de 7,74 € par heure pour les entreprises de moins de 250 salariés, et de 7,23 € par heure pour les entreprises de plus de 250 salariés. Désormais, le taux horaire de l’allocation d’activité́ partielle est égal pour chaque salarié concerné à 70 % de la rémunération horaire brute, dans la limite maximale de 4,5 fois le taux horaire du SMIC (4,5 x 10,15 € = 45,675 € pour 2020), et sans pouvoir être inférieur à̀ 8,03 € (sauf pour les contrats d’apprentissage ou de professionnalisation).
  • Le bulletin de paie doit comporter, en cas d’activité partielle, la mention du nombre d’heures indemnisées, du taux appliqué pour le calcul de l’indemnité́ d’activité partielle versée au salarié, et des sommes versées au salarié au titre de la période considérée. Auparavant, le Code du travail disposait simplement que l’employeur devait remettre au salarié « un document » portant ces mentions, mais il ne s’agissait pas forcément du bulletin de paie. Les anciennes dispositions du Code du travail à ce sujet peuvent continuer à être appliquées par les employeurs jusqu’au 25 mars 2021 s’ils le souhaitent.
  • Le montant de l’indemnité d’activité partielle devant être versée au salarié demeure inchangé : 70% de la rémunération brute servant d’assiette à l’indemnité de congés payés, ou par exception 100% pour les salariés suivant une formation durant la période de chômage partiel.

Ces nouvelles dispositions s’appliquent aux demandes d’activité partielle formulées depuis le 1er mars 2020.

Vous pouvez retrouver ici la note publiée par le Ministère du travail au sujet du dispositif exceptionnel d’activité partielle.

Attention : il n’est pas possible de cumuler le régime de l’activité partielle avec un arrêt maladie. En cas de conflit entre les deux événements, c’est en principe l’ordre chronologique qui prévaut.

II/ L’ordonnance n°2020-324 du 25 mars 2020 prolonge les droits aux indemnités chômage

Pour les demandeurs d’emploi qui épuisent, à compter du 12 mars 2020 et jusqu’à̀ une date fixée par arrêté́ du ministre chargé de l’emploi et au plus tard jusqu’au 31 juillet 2020, leur droit à l’une des allocations mentionnées aux articles L. 5422-1, L. 5423-1, L. 5424-1 et L. 5424-21 du code du travail (allocation d’aide au retour à l’emploi, allocation de solidarité spécifique, indemnités des agents publics et assimilés), la durée pendant laquelle l’allocation est versée fait l’objet, à titre exceptionnel, d’une prolongation. 
La durée de cette prolongation sera fixée par un arrêté du ministre chargé de l’emploi, elle n’est pas encore connue à cette heure.

III/ L’ordonnance n°2020-306 aménage les délais de procédure (hors procédure pénale)

ATTENTION : MISE A JOUR PAR ORDONNANCE N°2020-560 DU 13 MAI 2020

Tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque, et qui aurait dû être accompli pendant la période courant entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020 inclus, sera réputé avoir été fait à temps s’il a été effectué, à compter de la fin de cette période :
– dans le délai légalement imparti pour agir
– et sans pouvoir excéder un délai de deux mois.
Ainsi, par exemple, les actions prud’homales pour lesquelles le délai de prescription expirait en principe entre le 12 mars et le 23 juin 2020 pourront être introduites devant le Conseil de Prud’hommes jusqu’au 23 août 2020.
Attention, ces dispositions ne sont pas applicables :
1° Aux délais et mesures résultant de l’application de règles de droit pénal et de procédure pénale, ou concernant les élections régies par le code électoral et les consultations auxquelles ce code est rendu applicable ;
2° Aux délais concernant l’édiction et la mise en œuvre de mesures privatives de liberté ;
3° Aux délais concernant les procédures d’inscription dans un établissement d’enseignement ou aux voies d’accès à la fonction publique ;
4° Aux obligations financières et garanties y afférentes mentionnées aux articles L. 211-36 et suivants du code monétaire et financier ;
5° Aux délais et mesures ayant fait l’objet d’autres adaptations particulières par la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 ou en application de celle-ci.

IV/ L’ordonnance n°2020-312 prolonge les droits sociaux

Les personnes dont les droits à la Complémentaire santé solidaire ou à l’Aide médicale d’État arrivent à expiration entre le 12 mars 2020 et le 31 juillet 2020 bénéficient d’une prolongation de 3 mois.
L’aide au paiement d’une complémentaire santé qui arriverait à expiration dans cette même période sera prolongée jusqu’au 31 juillet 2020.
Les premières demandes d’Aide médicale d’État peuvent en outre être déposées exceptionnellement par courrier jusqu’au 31 juillet 2020.
Cette ordonnance contient également des mesures en faveur des personnes en situation de handicap.

V/ L’ordonnance n°2020-323 concerne les congés payés, les jours de repos et la durée du travail

Un accord d’entreprise, ou à défaut un accord de branche, peut autoriser l’employeur à imposer la prise de jours de congés payés acquis par un salarié :

  • dans la limite de six jours de congés
  • sous réserve de respecter un délai de prévenance qui ne peut être réduit à moins d’un jour franc
  • y compris avant l’ouverture de la période au cours de laquelle les congés ont normalement vocation à être pris.

L’employeur peut également être autorisé à modifier unilatéralement les dates de prise de congés.
La période de congés modifiée ou imposée peut aller jusqu’au 31 décembre 2020.
Par ailleurs, « lorsque l’intérêt de l’entreprise le justifie eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19 », l’employeur peut également imposer la prise de JRTT ou autres jours de repos, y compris en utilisant le compte épargne-temps du salarié :

  • sous réserve de respecter un délai de prévenance d’au moins un jour franc
  • dans la limite de 10 jours
  • sans aller au-delà du 31 décembre 2020.

Enfin, cette ordonnance prévoit d’importantes dérogations aux durées maximales quotidiennes et hebdomadaires de travail, ainsi qu’aux repos quotidiens et hebdomadaires obligatoires, pour les entreprises « relevant de secteurs d’activités particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale, déterminés par décret ».

VI/ L’ordonnance n°2020-328 prolonge les titres et autorisations de séjour divers

Pour les étrangers qui verraient leur autorisation de séjour sur le territoire français expirer entre le 16 mars et le 15 mai 2020, la validité des documents de séjour suivants est prolongée de 90 jours :
1° Visas de long séjour ;
2° Titres de séjour, à l’exception de ceux délivrés au personnel diplomatique et consulaire étranger ;
3° Autorisations provisoires de séjour ;
4° Récépissés de demandes de titres de séjour ;
5° Attestations de demande d’asile.

VII/ L’ordonnance n°2020-322 concerne le maintien de salaire dû par l’employeur durant les arrêts maladie

Par dérogation à l’article L1226-1 du Code du travail, jusqu’au 31 août 2020, les salariés en arrêt maladie bénéficient du maintien de salaire légal de leur employeur :

  • sans condition d’ancienneté
  • y compris pour les salariés travaillant à domicile, les salariés saisonniers, les salariés intermittents et les salariés temporaires.

Par ailleurs, les salariés bénéficiant de l’arrêt exceptionnel lié à l’épidémie de Covid-19 bénéficient du maintien de salaire légal dans les mêmes conditions, et en outre :

  • sans qu’il puisse être exigé d’eux d’avoir justifié de leur arrêt dans les 48 heures
  • sans obligation d’être soigné sur le territoire européen

Notre cabinet reste mobilisé et disponible pour répondre à toutes vos questions, n’hésitez pas à nous solliciter.